À travers l'écorce [Fan-fiction sur Johanna Mason] [Chapitre 19 en ligne !]

Le noir. La douleur. Les hurlements. Je ne dois pas céder. Je ne dois rien dire. Je ne sais rien. Les Rebelles ne m'ont rien dit. Pitié. Pitié, pitié, pitié ...

De l'eau. Encore le noir. Un grésillement. Un hurlement. Mon hurlement.

Toujours le noir. Un cri. Un nom. Finnick. Un autre cri. Un autre nom. Katniss.

La lumière. Une silhouette. Non deux, trois, quatre. Des hommes en uniformes. Blancs. Pacificateurs. D'autres hommes en uniformes. Gris. Rebelles. Des portes qui claquent. Des cris. Des sanglots. Annie. Ma porte qui s'ouvre. Une ombre qui rentre. Une main qui me soulève.

- Johanna.

Mon prénom. Mon gémissement. La peur. J'ai peur. J'hurle, je griffe, je mords, je pleure.

- Johanna, je m'appelle Gale. Je viens te sortir de là... Je suis un Rebelle.

Un nom. Un visage. J'arrête de griffer. J'arrête de mordre. Je continue de pleurer. J'entends des bruits de pas. Des coups de feu. Je gémis. Des bras me soulève avec précautions. J'hurle.

- Shhhh... Calme toi, Johanna. C'est fini, on s'en va.

Du sang. Des cadavres sur le sol. De la lumière. Trop de lumière. Mon nom. Annie. Elle crie mon nom. Le noir approche. J'ai peur. J'étouffe.

- C'est pour que tu n'aies plus mal. Laisse toi faire, tu es en sécurité.

Je laisse échapper un ricanement. Mensonge. Une aiguille approche avec à son bout, une main gantée de blanc. Je grogne. J'essaye de fuir. Des bras me serrent. Je suis immobilisée. Pas d'eau pitié, pas d'eau ...

L'aiguille pique mon bras. Je me sens partir. Mon corps ramollit. Le noir arrive, m'enveloppe. Une voix murmure, rassure, me berce.

Des bips. Encore et encore des bips. Des voix m'entourent. M'oppressent. J'ouvre les yeux. La lumière m'aveugle. Partout du blanc. Sur les murs, les meubles, les gens et même moi.

On m'appelle. Je ne réponds pas. On me pose des questions. Je les ignore. Je ferme les yeux pour retrouver le noir.

Je grogne alors qu'une main gantée s'approche de mon bras. Je claque des dents et la main recule.

- Laissez la tranquille.

Une voix rauque, sûre d'elle, un peu chevrotante mais tellement familière. Haymitch.

- Salut Princesse.

Il a du me voir m'agiter.

- Salut vieux poivrot.

Il sourit et s'assoit à côté de moi sur une chaise bancale.

- Tu as l'air en meilleure forme que quand tu es arrivée.

- C'était quand ?

- Il y a une semaine.

J'étais inconsciente si longtemps ...

- On est où ?

- Dans le district 13.

- Comment va Annie ?

- Bien, elle est avec Finnick.

Evidemment, si Annie est avec Finnick elle ne peut qu'aller bien.

- Et le garçon ?

Il grimace, hausse les épaules et marmonne des paroles inintelligibles.

- Il a bien morflé lui aussi.

- Ouais, j'ai entendu.

Je ferme les yeux et de nouveau je suis dans ma cellule. J'entends ses cris et ses sanglots tantôt proches, tantôt lointains.

- Je veux voir Fin et Annie.

Il hoche la tête, l'ombre d'un sourire sur les lèvres.

- Je m'en doutais, ils attendent dehors.

Il se lève et revient quelques secondes plus tard avec mes deux amis. Annie court, se jette sur moi, me serre fort, m'embrasse, sanglote, renifle, m'embrasse et ainsi de suite. Finnick s'assoit au bord de mon lit et serre ma main dans la sienne.

- Salut vieille branche, murmure-t-il.

- Salut vieux thon, dis-je doucement. Vous avez l'air en forme tout les deux, ça fait plaisir.

- C'est un peu grâce à toi tu sais, chuchote Annie en essuyant ses larmes.

Je roule des yeux et fixe Finnick. Il comprend, hoche la tête. Je comprend, je souris puis fronce les sourcils. Il grimace et me fait signe d'attendre.

- Annie, tu pourrais aller chercher un médecin plus compétant que celui qui me soigne ?

Elle se lève et disparaît.

- Ils ont modifié ses souvenirs avec le venin de guêpes tueuses, déclara le roux. Il croit que Katniss est une mutation génétique et il a voulut la tuer en l'étranglant.

- hmm ... Embêtant ... Sinon que fais tu de tes journées, le questionnais-je en voyant Annie revenir avec une de ces maudite blouse blanche.

- Je m'entraînes quelques heures pas jours pour ne pas perdre la forme et je passe le reste de ma journée avec Annie.

- Chouette programme.

Il me sourit et sert ma main un peu plus fort.

- Je trouve aussi.

La pièce se trouble dès que le médecin me plante une aiguille dans le bras. Je sens les lèvres de Finnick sur mon front et puis plus rien.

C'est devenue comme un réflexe : le moindre signe de douleur, le plus petit picotement et une silhouette blanche vient apaiser le début de mes souffrance.

Parfois je reconnais d'autres personne que celui qui vient m'administrer ma dose quotidienne de morphine: Finnick et Annie principalement, Haymitch et Beetee plus rarement. Et un jour, une nouvelle ombre dont le nom m'échappe mais que je suis pourtant sure de connaître vient me voir. On a du réduire ma dose de drogue car je suis assez réveillée pour parler mais surtout, pour avoir mal.

- Alors c'est toi Johanna.

- Possible et toi tu es ... Peeta dis-je en reconnaissant ses cheveux blonds

- Oui, il parait que s'est moi sourit-il en s'asseyant sur la chaise à côté de mon lit

- Que puis-je pour toi blondinet ?

Il avait l'air un peu hésitant, juste un peu.

- Tu sais, je ne savais pas que c'était toi dans la cellule...

Je ne réponds pas, j'attends la suite.

- Je ne savais pas que c'était toi Johanna Mason.

Je lance un coup d’œil intrigué à Haymitch, Finnick et Gale qui avec un groupe de médecins armés de blocs-notes semblent aussi confus que moi.

- Sinon je ne t'aurais pas autant plains lorsque tu hurlais.

Je plantes mes ongles dans ma paume et serre les dents pour me retenir de lui sauter dessus afin de lui faire ravaler ses paroles.

- Tu devrais te taire, lui conseillais-je d'une voix étrangement calme. Ce qui s'est passé au Capitole doit y rester mais si tu tiens tant à parler du bon vieux temps...

Il frissonne et se tasse sur lui-même. Il se souvient des confidences qu'il m'a faites lors de notre captivité. Il marmonne quelque chose que je ne comprend pas et je soupire.

- Johanna est très fatigué, nous devrions la laisser se reposer, propose Finnick.

- C'est ça, fichez moi le camps. Hé, n'oubliez pas ma piqûre !

Une infirmière s'approche de ma perfusion et y injecte mon nouveau trésor qui ne tarde pas à me faire plonger dans les limbes.

Génial, j'ai une nouvelle camarade de chambre. Ma meilleure amie: Katniss Everdeen. J'ignore ce qu'il s'est passé, je crois savoir qu'elle était dans le deux, pour je ne sais quelle mission mais quand je me suis réveillée, elle était là.

Les salauds commencent à diminuer ma dose de morphine. Finnick dit que c'est pour mon bien, pour ne pas que je finisse comme les vainqueurs du 6 -comme je les envie ceux-là, ils étaient bien dans leur monde, personne ne les faisaient chier-. Je lui dit d'aller se faire foutre. Il a Annie, j'ai la morphine. Si on m'enlève ma drogue pourquoi on ne fait pas la même chose pour lui ? Ça le fait sourire. Pas moi.

Ils apportent une nouvelle perfusion à la fille du feu. Je fais semblant de dormir mais je les vois lui injecter de la morphine. Dès que la voie est libre, je lui pique le précieux anti-douleur. Qu'elle ose se plaindre et je lui balance mon poing dans son joli minois. J'ai sauvé sa vie, elle me doit bien ça.

Finalement, une fois réveillée, Miss-je-mène-la-révolte ne dit rien pour la morphine mais je sais que bientôt, elle sortira de l'infirmerie et sans morphine à voler à qui que ce soit je serais obliger de me sevrer. Je comprends mieux Haymitch maintenant.

J'habite avec la fille du feu. Génial. Bon ça pourrait être pire, au final elle n'est pas si chiante mais quand-même.

Mes cheveux commence à repousser. Ca ne ce voit pas encore mais quand je passe ma main sur mon crane je sens un petit duvet. Annie à proposer de ce couper les cheveux par solidarité. J'ai refusé.

Parfois Peeta vient me voir, bizarrement depuis sa première visite il n'a plus fait aucune remarque sur notre emprisonnement. On parle de tout de rien, parfois on se tait. Je l'aime bien ce gosse. Le minier vient aussi. Gale, celui qui est venu me délivrer du Capitole. Je l'aime moins.

Comme on passait notre temps à ne rien faire, on à décider avec Katniss d'aller nous entraîner pour être acceptées dans l'armée du 13 -parce que oui, ils ont une armée - et faire autre choses que les plantes vertes toute la journée.

Retour à la case départ: l'infirmerie du District 13. Et dire que je commençait à réussir à me passer de morphine. J'étais sure qu'ils essayeraient de me noyer pour le test d'entrée.

Finnick pénètre dans la pièce. Il est si heureux depuis son mariage avec Annie. En même temps dès qu'Annie est dans son champs de vision il est l'homme le plus heureux du monde.

Il s'allonge dans le lit à côté du mien. On m'a dit qu'à son arrivée, Finnick était dans un état mental si déplorable qu'il ne sortait jamais de l'infirmerie. J'ai du mal à croire à ces ragots quand je le vois. Il sort un bout de corde de sa poche et me le tend. Puis, il vient s'allonger sur mon lit, me forçant à lui faire de la place. Je grogne un peu pour la forme puis, mécaniquement mes doigts commencer à réaliser les nœuds qu'il m'a appris tandis que ma tête se pose sur son épaule.

- J'ai essayé Finnick, je te le jure, j'ai vraiment essayé.

Ma voix est calme et pourtant, à l'intérieur je suis dévastée. J'ai ce sentiments d'échec qui me bouffe, je me dégoûte.

- Je sais Johanna, je sais.

Il embrasse ma tête et me serre fort contre lui. J'aimerais pleurer, fondre en larme comme je le faisais si bien lors de mes premiers jeux, pour faire croire aux autres que j'étais faible. Je renifle, frotte mes yeux, essayant par tous les moyens de faire couler des larmes. Finnick me berce quelques minutes, juste assez pour que je me calme.

- Où est Annie ?

- Elle dort. Tu veux que j'aille la réveiller ?

- Non, laisse là se reposer, elle en a besoin, on en a tous besoin.

Je me lève. J'étouffe, l'endroit et trop aigu. Je revois encore l'eau arrivée dans la rue, l'inondée. J'ai l'impression que les Pacificateur viennent de m'arroser avec un seau d'eau avant de m'électrocuter.

- Il faut que je sorte d'ici.

- Quoi ? Johanna, ne dis pas de bêtises, tu ne peux pas, pas dans l'état où tu es...

- Fais moi sortir d'ici !

Mon ami se tait avant d'hocher la tête. Il part discuter avec l'infirmière de garde. Elle est assez jeune et ne semble pas indifférente aux charmes du célèbre Finnick Odair. L'intéressé s'en rend compte également et au bout de quelques minutes, la jeune écervelée disparaît.

- Appuie toi sur moi.

Voyant que je tiens à peine sur mes pieds il me porte jusqu'à la sortie.

- Comment t'as fais ?

- Je lui ai dit que tu te sentais mal et que tu voudrais dormir.. Où tu vas aller maintenant ?

- Partout, nulle part. Ne t'inquiète pas pour moi, je vais juste me balader un peu.

- Et après tu reviens ici ?

- Promis.

Finnick aimerait m'accompagner jusqu'à ma chambre mais il me montre son poignet, où il est inscrit qu'il a rendez vous avec d'autres soldats de son unité. Unité où je ne suis pas acceptée. Il part et je me mets à traîner dans la cité souterraine où je vis maintenant.

Je croise mon regard dans une glace. J'ai toujours été blanche mais là, j'ai pris la même teinte qu'un lavabo. Mes cheveux ont, à ma plus grande joie repoussés, et ils se dressent en pointe sur mon crane. Je n'ai jamais été belle mais là, je suis carrément repoussante. Je vois un autre reflet dans le miroir.

Gale s'approche de moi, l'espace d'un instant j'essaye de trouver une réplique qui explique ma présence, une petite pique comme j'ai l'habitude de faire mais rien ne vient. Je pars dans une autre direction, espérant le fuir mais c'est peine perdue car il réapparaît à mes côté. J'abandonne l'idée de le semer et jette un coup d’œil à son poignet. Lui aussi à rendez vous avec le reste de son unité.

Je me tais, il doit savoir ce qu'il fait et, dans le cas contraire, ça retombera sur lui, pas sur moi. Nous déambulons à travers moult couloirs et passons devons moult portes sans se décrocher un mot. Enfin, nous sommes de retour devant l'infirmerie. Une vieil homme à remplacer la jeune greluche et il me place d'autorité dans un lit.

Gale attend est à quelques mètres de mon lit. Je sais que c'est Finnick qui s'est arranger pour qu'il me trouve. J'ai envie de lui hurler dessus, d'aller attraper cet imbécile de rouquin et de lui dire que je n'avais pas besoin de lui mais je le ne fais pas. Parce que je sais, tout comme Finnick, que sans Gale, je ne serrais pas revenue ici et que j'aurais fait une crise. La jeune fille de toute à l'heure apparaît et branche ma perfusion. Aux regards sévère que lui lance le médecin je comprends qu'elle à dû passer un mauvais quart d'heure. Je lance un coup d’œil à Gale, toujours immobile.

Son bracelet ce met à clignoter mais aucun de nous deux ne bouge. On se fixe en silence.

- Je devrais peut-être y aller, finit-il par dire.

- Peut-être.

Je m'allonge, croisant mes bras derrière la tête.

- Au revoir Johanna.

- Au revoir Gale.

Je fixe un point, quelque part sur le mur blanc en face de moi. J'essaye de ne pas sombrer. C'est dur. Jusqu'à présent, je n'avais jamais tenté de lutter contre les effets des drogues qu'on m'administrait mais là, je m'interdis de me laisser aller.

Je n'ai jamais aimé dormir. Pas depuis ma sortie de l'arène en tout cas. Je hais ces instants où on ne contrôle plus rien et où notre subconscient nous assaille d'images atroces. Je n'ai plus rêve depuis ma Victoire. Ou du moins, jamais de rêve qui ne finissaient plus en cauchemars. J'avais réussis à oublier ici. Comme si une part de mon cerveau mettait sous clefs tous mes souvenirs. Mais aujourd'hui les barrières ont cédé et je sais que si je dors, tout reviendra. Tous ces instants sombres, ces moments où j'ai souffert, où j'ai voulut mourir.

Je tourne la tête pour voir Katniss venir vers moi. Elle tient quelque chose dans sa main qu'elle me donne.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Quelque chose que j'ai fait pour toi. A ranger dans ton tiroir.

Mon tiroir. Je n'ai rien à mettre dedans et je ne vois pas qu'est ce que ce truc y changerais.

- Sens le, me dit le Geai Moqueur.

Je porte le bout de tissus à mon nez. Une forte odeur de sapin m'enveloppe. Brusquement je me retrouve dans la forêt qui bordait entièrement mon District. Je me revois grimper au arbres avec mes amis, jouer à cache-cache entre les conifères, m'endormir au pied d'un arbre. Je revois tout ce que j'ai toujours connu, mon frère qui montait jusqu'à la cime des plus hauts arbres sans jamais tomber, mes soeurs avec qui nous récoltions les aiguilles de sapin pour en faire des baumes, mon père m'enseignant que les arbres étaient plus vieux que Panem lui-même. J'ai l'impression d'être de retour chez moi.

- Ca me rappelle la maison.

Je reconnais à peine ma voix qui semble se briser. J'ai envie de partir, de retourner dans ma maison en bois, dans mon District avec mes amis et ma famille. Je sens les larmes piquer mes yeux et je dois me concentrer pour ne pas pleurer.

- C'est ce que j'espérais. Vu que tu viens du Sept. Tu te rappelles notre première rencontre ? Tu étais déguisée en arbre. Enfin brièvement.

Je pense à mon costume de la parade, pâle copie d'un arbre qui peuple mon District. Snow m'a tout pris, tout ce que je chérissait il me l'a volé. Plus d'amis, plus de famille. Dans mon District les gens me voient comme une pestiférée qui n'apporte que la mort. Je le hais pour ça, pour m'avoir voler tout ce pourquoi j'aspirais à vivre.

- Tu dois le tuer, Katniss.

J'emprisonne son poignet dans ma main. Il faut que ça cesse, que Snow paye pour tous les crimes qu'il a commis.

- Compte sur moi.

- Jure-le. Sur quelque chose à quoi tu tiens.

Elle semble hésiter quelques dixièmes de secondes.

- Je te le jure sur ma vie.

Je ne lâche pas son bras. Qu'est-ce que la vie quand on vous à tout pris ? Qu'est ce que la vie quand on à personne à chérir ?

- Sur la vie de ta famille.

- Sur la vie de ma famille, répète-elle.

Je libère son poignet qu'elle se met aussitôt à masser.

- Qu'est ce qui te fait croire que j'ai été prise de toute façon ?

J'affiche un mince sourire, je suis sure qu'ils l'ont acceptée. Elle est forte, intelligente et elle est capable de vaincre ses peurs contrairement à moi.

- J'avais juste besoin de l'entendre.

Je reprend mon sachet et colle mon nez dessus, fermant les yeux. Si Katniss n'est pas stupide elle comprendra pour elle qu'il est temps de partir. Lorsque je rouvre les yeux, elle n'est plus là. Je regarde le cadeau qu'elle ma fait.

J'aimerais revoir l'immense forêt qui s'étale sur tout mon district, toutes les sortes d'arbres qui peuplent le Sept. J'ai toujours eu un faible pour les sapins, je ne sais pas si Katniss le savait, peut-être est-ce juste dû au hasard ou au fait que le sapin est l'arbre le plus connu et le plus répandu chez moi. Je me souviens des sapins planté devant ma maison.

Je pouvais passer des heures à regarder le vent jouer avec leur aiguilles et caresser leur troncs centenaires. J'avais toujours eu un immense respect pour les arbres, mon père disait souvent que les arbres avaient une âme, qu'ils étaient le poumon de la terre. Je ne comprenais pas trop, mais les paroles remplies de sagesses de cet homme qui embrassait chaque arbre avant de le couper me faisait penser qu'il avait raison. Pour moi, les arbres veillaient sur nous, puissants, majestueux. Ils nous protégeaient à leur manières.

J'aimerais rentrer chez moi, m'allonger dans l'herbe de mon jardin comme lorsque j'étais enfant. Mes parents seraient là ainsi que mon frère et mes sœurs. Mes amis viendraient me chercher pour une balade dans les bois et je n'aurais plus peur ni de l'eau ni du noir. Comme avant.

Je renifle mon cadeau sans réussir à empêcher les larmes de couler. Je veux revenir en arrière, je veux que mon nom ne soit pas tiré à la moisson. Je veux mourir. J'aurais du mourir lors de mes jeux, j'aurais eut moins mal. Quelque soit la douleur qu'on inflige avant la mort, ce sont toujours les survivants qui souffrent le plus. Les vainqueurs sont les véritables victimes des Hunger Games.

J'ai mal. Plus que Finnick même si lui aussi souffre. J'aimerais bien trouver mon Annie à moi. Cette personne qu'on chérit plus que tout, pour qui on est capable de mourir.

Je soupire, la pièce est vide, personne. Dommage, je suis d'humeur à parler de mon ancien moi. La Johanna Mason qui aimait la vie, j'étais aussi facile à vivre que Finnick. J'étais, je ne suis plus. Je ne suis plus rien.

Finalement, au bout de quelques jours on m'a laissé sortir. J'ai réintégré ma chambre où je continue de m'ennuyer toute la journée. Sans Katniss cette fois.

Finnick a décidé de me tenir compagnie pendant que Miss Everdeen fait je-ne-sais-quoi. Il m'a parlé durant plus d'une heure du trident que lui a confectionné Beetee et je dois avouer que je suis jalouse. Je suis sûre que si j'avais réussis ce foutu examen, moi aussi j'aurais eu une arme. Une hache, bien entendu. Peut-être multi-lames ou alors faite avec un métal révolutionnaire.

- Je veux rentrer à la maison, dit Finnick.

L'espace d'un instant j'ai envie de lui dire que sa maison a mystérieusement brûlée lors d'un incendie "accidentel" et que s'il veut parler de sa maison du Capitole, elle doit être dans un état lamentable mais je ne dis rien, c'est pas le genre de choses qu'il a envie d'entendre je le sais.

Nous avons élu domicile sur mon lit, ma tête est posée sur les genoux de Finnick qui passe mécaniquement la main dans mes cheveux. Tout à l'heure, un type que je ne connais pas est passé devant nous et il nous a fixé d'un air étrange.

Je sais ce que les gens pensent, qu'entre Finnick et moi c'est plus qu'une simple histoire d'amitié. Et c'est la vérité, Finnick Odair n'est pas mon ami, il est bien plus que ça. Au début, j'étais persuadée que j'avais le béguin pour lui. Il est beau, intelligent, il me fait rire, il me comprend, bref c'était le parfait Prince Charmant dont toute les filles rêvent. En fait je crois que j'étais vraiment amoureuse de lui. Peut-être même que je le suis encore.

Mais je ne suis pas stupide. j'ai toujours su que ça n'aboutirais à rien. On ne vient pas du même District et même s'il ne se l'avouait pas encore, il était déjà fou d'Annie.

Annie ... ça a toujours été une évidence, dès la première fois que je l'ai vue, lors de ses jeux, je n'ai pas pu m'empêcher de me dire que Finnick allait énormément souffrir de sa perte. Parce qu'elle allait mourir c'était évident. Elle devait mourir. Pas parce que j'étais jalouse d'elle mais parce qu'Annie, elle n'était pas fait pour être une gagnante. J'ai l'habitude de classer les gens en deux catégorie : ceux qui sont tailler pour survivre, près à tout pour se sauver et ceux qui aiment la vie, qui sont fait pour être heureux dans un endroit où le mal n'existe pas. Annie appartient à la deuxième catégorie tout comme Peeta.

J'ai tout de suite compris que Finnick aussi savait qu'elle devait mourir, il la regardait comme si c'était la dernière fois, il la collait, attentif à ses moindre gestes. Les gestes d'une mourante. Annie était une fille douce. C'est ce qui m'a tout de suite frappé, sa douceur. Elle parlait d'une voix calme et rassurante, une voix qui vous berce comme les vagues. Annie n'était pas faite pour supporter le poid d'une couronne, ni pour tout ce qui suivait le gain de la dite couronne. La prostitution. Elle était jolie Annie. De long cheveux brun caramel, des yeux verts, une peau halée par le soleil du District 4. Elle était belle, Finnick le savait. Il savait aussi que Snow voudrait la vendre. Et Annie était trop fragile pour supporter ça.

Au fond, c'était une bonne chose qu'elle ait assisté à la mort de son tribut. Finnick pensait la même chose même s'il ne l'aurait jamais dit. Elle était peut-être devenue folle mais ça avait eu l'avantage d'effrayer les clients potentiels. Je me souviens bien du jour où elle avait revisionner l'intégrale de ses jeux comme tous les gagnants. La crise qui avait suivie avait fait la réputation d'Annie Cresta renommée la folle du District 4.

- Tu n'as pas envie toi ?

- De quoi ?

- De rentrer à la maison.

Je soupire et lève les yeux pour rencontrer ceux, verts et intenses de Finnick. Il me dévisage calmement, d'une expression un peu rêveuse.

- Si, bien sur que si.

La porte s'ouvre pour laisser entrer Annie et sans même le voir, je sais que Finnick doit sourire comme un imbécile heureux. Elle grimpe l'échelle et se glisse sous mes jambes, à côté de son mari.

Son mari... Ca me fait toujours bizarre que Finnick soit marié, lui, le célèbre Finnick Odair, connu pour être l'un des plus grand coureur de jupon que Panem n'ait jamais connu.

- De quoi parliez-vous ? demande Annie

Elle a l'air étrangement normale. Oh bien sur, ses yeux sont dans le vague et elle fixe un point qu'elle est la seule à voir mais pour une fois, elle semble consciente de ce qui l'entoure, autre que Finnick bien entendu.

- On parlez de rentrer à la maison, répond le jeune homme.

Annie ne répond rien et le silence s'installe durant quelques minutes.

- Quand est-ce que tout ça finira-t-il ? demande finalement la petite brune. Quand aurons-nous de nouveau une vie normale ?

- Tu as gagné les Hunger Games Annie, tu n'auras jamais de vie normale.

Et puis d'abord c'est quoi une vie normale ? Crever de faim, se tuer au travail ?

- Mais ça ne nous empêchera pas d'être heureux ! dit précipitamment Finnick en me foudroyant du regard.

Il faudrait quand même lui dire à Annie, que la vie n'est pas un long fleuve tranquille. Cette fille se berce de trop d'illusions. Personnellement, je ne me voyais pas être heureuse dans une avenir proche ou lointain. Peut-être que je ne suis pas faite pour ça. Annie et Finnick le seront eux, ça, j'en suis sur, mais moi ...

Je me lève, il est l'heure d'aller manger l'horrible pâté qu'on nous sert ici, dans le District 13

- Tu es triste que je ne puisse pas venir avec toi, hein ? demandais-je ironiquement

- A un point inimaginable ! mentit Finnick.

En vérité, il est ravi que je n'ai pas réussi mes tests. Je le sais car même s'il ne dit rien, il a peur de ne pas revenir. C'est la guerre, la vraie. L'arène à côté, c'est une cour de récréation.

- Bah, vous êtes l'élite, les stars, vous êtes intouchables, non ?

Je me demande qui j'essaie de rassurer: lui ou moi ? Les deux surement. Finnick m'offre une pâle imitation de son sourire le plus éblouissant. Outch, la situation doit être vraiment grave pour qu'il perde son optimisme habituel.

- En quelques sorte, oui.

- Tu vas revenir Fin' n'est-ce pas ? Avec un bras en moins, borgne et plus moche que jamais mais tu vas revenir ?

Il lève les yeux au ciel avant de me serrer dans ses bras.

- Oui je vais revenir.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'il ment, que, d'une façon ou d'une autre il sait qu'il ne reviendra pas. Il doit se rendre compte que je ne le crois pas car il cherche à me convaincre:

- Je vais tout faire pour, en tout cas. Tu n'en as pas encore fini avec moi ma jolie !

C'est pitoyable. Nous sommes pitoyables. Je sais qu'il ne reviendra pas, il a survécu à de trop nombreux pièges de la part de Snow pour y réchapper cette fois. J'ai envie de lui dire de rester, de lui dire qu'Annie à besoin de lui, que j'ai besoin de lui. C'est égoïste, j'en conviens, mais Finnick est ce qu'il me reste de plus proche d'une famille, il est mon ancre, celui qui arrive à me faire voir le bon côté de chose même quand il n'y en a pas.

- Annie n'y survivra pas si tu meurs.

- Je sais ...

- Et moi non plus ...

Il lève ses yeux qui font glousser toutes les greluches du Capitole. Ses beaux yeux verts qui semblent briller. Peut-être à cause des larmes qui menacent de déborder.

Je sens ses bras m'encercler. Ils sont si forts ses bras. Puissants et réconfortants. Mais aujourd'hui, je les sens trembler.

Finnick est jeune. Il a peut-être survécu deux fois à l'arène mais cette fois-ci, sa beauté ne l'aidera pas, il n'aura aucun sponsors, il sera seul, livré à lui-même.

- J'ai peur de mourir.

Moi aussi j'ai peur qu'il meurt. Je pose mon menton sur son épaule et fixe la porte derrière lui. Une porte blanche.

- C'est normal Finnick.

- Tu crois ?

- Oui. Ça prouve que tu es humain. Avec un cœur qui bat pas comme ces types du Capitole !

J'ai beau ne pas voir son visage je sais que j'ai réussis à le faire sourire. Une voix se fait entendre, je ne sais pas où sont placées les enceintes mais j'ai l'impression qu'elles bourdonnent jusqu'au tréfonds de mon âme

Je serre Finnick au point de l'étouffer. Je ne veux pas qu'il parte, je ne veux pas que la dernière personne qui m'aime s'en aille. On se sépare, enfin il me sépare de lui.

- Veille sur elle, Johanna, veille sur Annie, aussi longue sois mon absence. Promets le moi !

Je sens la panique nous envahir. Dans ses yeux brillent des larmes de détresses. J'ai l'impression de revoir le gamin de 14 ans qui ne savait pas vraiment ce qu'il se passait autour de lui. Il a le regard un peu fou des hommes qui doutent de revenir.

- Je te le promets. Finnick ! Jure moi de tout faire pour rentrer, jure le moi !

On doit juger les adieux un peu trop long parce que des hommes viennent me chercher. Ils m'attrapent et m'entraînent vers l'extérieur.

J'entends Finnick me jurer et alors que la porte se referme, j'entends ces derniers mots :

- Je vous aimes, ne l'oublie pas et dit le à Annie !

Des paroles d'adieux. Les dernières parole qu'il m'adressera.

Je me demande de quoi on à l'air tous les trois, assis par terre, à faire des nœuds avec les cordes que Finnick nous a donné.

- Ah vous voilà ! Coin vous cherche.

Grognement général. Le réponse est claire, aucuns de nous ne désire voir Coin. J'entends Annie taper son crâne sur le mur, Peeta la calme d'une pression de la main.

- En fait elle ne veut voir que Peeta..

Immédiatement, je sens la jeune femme se resserrer contre l'intéressé qui est désormais immobile. Je fixe les roues du fauteuil en face de moi.

- Dis moi Beetee, tu n'en a pas marre d'être le toutou de Coin et d'agiter la queue dès qu'elle remue le petit doigt ?

- Au moins je suis occupé, ça m'évite de trop penser à ce qui se passe dehors.

- Mais ça ne te donne pas de cauchemars de savoir que tes armes, celles que tu as crées prennent la vie de gens parfois innocents ? murmure Peeta en dénouant un flot marin.

- Si mais j'essaye de me dire que ça protège aussi beaucoup de monde. Grâce à mes armes, Katniss, Finnick, Gale et les autres sont toujours en vie et c'est ça le principal non ?

- Tu l'aimais comment Wiress ?

Je ricane, c'est du Annie tout craché de ne parler que pour poser des questions gênantes mais que tout le monde s'est déjà posé.

- Je ne sais pas trop. Tu sais, Wiress était très spéciale.

- Il veut dire, traduis-je, qu'elle était folle. Un peu comme toi.

La jeune femme penche la tête, les yeux perdus dans le vague, ses mains suspendues dans le vide, elle semble ailleurs. Puis, au bout d'une minute ou deux, elle revient à elle-même, hoche la tête et recommence ses nœuds sans plus nous prêter attention.

- Tu la connaissais avant les jeux? questionne Peeta

- De vue seulement. Vous avez d'autres questions ?

Je tourne la tête vers Peeta. Il me sourit. Je tapote le sol et Beetee se lève de son fauteuil, un peu tremblant sur ses jambes avant de se laisser glisser à terre à côté de moi.

- Encore tout un tas. Tiens, prendre ma corde j'en ai une autre, dis-je en tendant le bout de cordelette au brun.

Je me demande de quoi on à l'air tous les quatre. Quatre gagnants de quatre Districts différents, aux mains plus ou moins tachées de sang, à la santé mentale plus ou moins nette et qui, malgré tous leurs efforts ne seront jamais abandonné par leur passé.

En silence, on se remets à faire nos nœuds, encore et encore, inlassablement, Annie nous guide, et parfois alors qu'elle s'arrête, on s'attend presque à ce que Finnick complète ses explications. Une voix mécanique requiert la présence de Peeta dans le bureau personnel de Coin.

On ne dit rien, on continue nos nœuds mais l'atmosphère n'est plus la même. ce n'est plus un silence reposant qui nous entoure mais un silence tendu. Je sens le bras de Peeta trembler contre le mien et je pose ma paume sur son poignet, calmant les spasmes et éloignant l'ombre d'une des crises qui le prenait parfois. Un peu comme celles d'Annie.

Je me tourne vers Beetee qui me regarde, l'air terriblement désolée. Le bureau personnel de Coin, c'est un peu comme un dîner aux chandelles avec Snow.

- Qu'est ce qu'elle veut ?

- Écoute Johanna, je crois que ça ne regarde que ...

- Qu'est ce qu'elle veut ?

J'avais une idée, une toute petite idée de ce que Coin voulait et je priais pour que ce soit faux, pour que je me trompe. Mais mon instinct me crie que c'est vrai.

- Elle veut l'envoyer se battre avec les autres.

- Étonnant, vraiment, je ne m'y attendais pas.

Mon ton ironique, à la fois déçu et en colère avait dû effrayer Beetee car l'homme baisse les yeux sur la corde qu'il tord entre les mains, honteux.

- Veux-tu que l'on t'accompagne ? Propose Annie comme s'il s'agissait d'une balade sur la grève.

- Non, non, je vais y aller ... seul.

Peeta se lève et commence à partir. Annie m'envoie un coup de coude dans les côtes suivit d'un regard assassin. Je lui fais les gros yeux mais elle se contente de suivre le boulanger du regard avant de me foudroyer de ses beaux yeux verts.

- Tu sors vraiment de ton monde que quand ça t'arrange Cresta, bougonnais-je en me levant.

- Cresta-Odair, me corrige-t-elle mécaniquement.

En soupirant, je me lève et trottine pour rattraper le garçon.

- J'ai décidée de t'accompagner, j'en profiterai pour rendre une petite visite à mon amie Alma, tu sais à quel point on s'adore toutes les deux !

Ma boutade a au moins le mérite de le faire sourire.

- Alors ?

- L'équipe de Boggs à perdue un de ces membres, la Présidente me pense capable de gérer mes ... pulsions et de mener à bien ma mission.

- Qui est ?

- Je ne sais pas encore, je serais mis au courant une fois sur place.

Il a l'air de ne pas savoir comment réagir. Je lui tapote gentiment l'épaule.

- Génial tout ça, bon à mon tour.

J'entre dans la pièce et referme la porte derrière moi. Le bureau est à l'image de sa propriétaire: strict et snob. Coin est assises devant un bureau métallique où s'entassait une pile de dossier parfaitement rangés. Les murs, le sol, les meubles, Coin, tout est gris et morne. Entre le blanc et le gris, je commence sérieusement a déprimé dans le District 13.

- Mademoiselle Mason. Je ne me souviens pas que nous avions rendez-vous.

- Bah vous avez bien une minute pour la pauvre fille que je suis ?

- C'est que je dois aller ...

- A la bonne heure ! Je savais que vous sauriez vous montrer attentif aux besoins d'une malheureuse gagnante, torturée par le Capitole tout ça pour vous et votre rébellion très chère Présidente Coin !

Elle grimace avant de me désigner la chaise en face d'elle. Je m'assis sur le bord de son bureau et je la vois retenir son souffle.

- Vous savez, quand tout serra fini, quand Snow ne sera plus... C'est vous qui serez à la tête du pays.

- Je n'ai pas le prétention de le dire mais ....

Je retient de justesse mon ricanement: et son titre de Présidente c'est pour faire joli ?

- Vous espérez bien être à la tête de Panem je me trompe ? Je n'attends pas qu'elle réponde et enchaîne: et vous savez aussi que les gagnants sont très apprécié alors vous mettre à dos plusieurs d'entre eux, ce n'est pas très conseillé, vous me suivez toujours ?

- Oui mais je ne vois pas très bien où vous voulez en venir Mademoiselle Mason...

- Je veux dire que si Peeta, Katniss, Finnick ou même Gale reviennent abîmés ou ne reviennent pas du tout... Vous perdrez des soutiens très précieux.

- Est-ce une menace ?

- Non, pour le moment c'est juste un avertissement. Maintenant je vous laisse, il faut que j'aille ingéré l'immonde bouillie qui nous sert de repas. Quand Panem apprendra la manière dont on nous traite, soupirais-je d'un ton faussement contrit.

- Bouillie ou pas vous avez l'air d'aller beaucoup mieux.

- Et vous en êtes ravie, je le sais ! Et bien sur ce..

Je me lève et quitte la pièce.

Peeta m'attend, appuyé contre un mur, plongé dans ses pensées. Lorsqu'il me voit, il ne pose aucunes questions. Nous retournons chercher Annie et Beetee et partons au réfectoire. Nous mangeons en silence jusqu'à ce que Peeta le brise:

- C'est peut-être une bonne idée qu'a eu Coin... Enfin, se reprend-il en voyant nos visages choqués, ça va peut-être m'aider à retrouver la mémoire.

- Je ne crois pas, dit doucement Beetee. Il faudrait que ça soit des événements que tu as déjà vécu, des situations similaires..

- Et à ce que je sache tu n'es jamais parti en Guerre pour tuer Loverboy.

Il grimace au surnom.

- Tu t'en souviens ?

- De quoi ?

- De la personne qui t'appelait comme ça. Loverboy.

Il fixe un point derrière moi puis secoue la tête comme pour chasser un mauvais souvenir.

- Mais j'ai fait les Hunger Games, deux fois, ça revient au même non ?

- Tu n'as tué personne Peeta, observe le vainqueur du 3, mis à part une malheureuse qui agonisait. Tu as abrégé ses souffrances, ce n'est pas un crime au contraire.

- Et puis, ajoutais-je d'un ton badin, la seule grosse bourde que tu pourrais faire c'est d'essayer à nouveau de tuer Katniss. Et de réussir.

Peeta relève la tête, une expression inquiète sur le visage.

- Tu crois que je pourrais essayer de nouveau ?

- Je ne pense pas, l'apaisa Beetee, tu as fait beaucoup de progrès depuis ton retour, tu es presque redevenu comme avant.

- Pour le peu qu'on te connaissait, soupirais-je. Franchement, je ne pense pas que tu es une chance de la tuer, Finnick t'en empêchera.

Ses épaules se détendent légèrement.

- Et puis Gale t'aura déjà sauté dessus avant que tu puisse faire quoi que ce soit, depuis le temps qu'il en rêve.

Beetee enfouit son visage dans ses mains en soupirant tandis qu'Annie dodeline de la tête en me regardant comme si j'étais une idiote. Peeta se lève prestement.

- Hé, t'as pas finis, l'apostrophais-je

Il pousse son assiette vers moi avant de sortir en courant.

- J'ai dis quelque chose qu"il fallait pas ?

- Tu crois vraiment que j'en serais capable ? finit par me demander Peeta après de longues minutes de silence.

Nous étions dehors, au centre d'entraînement de l'armée du District 13. J'avais rejoint le blond après avoir finit nos deux assiettes et forcé Annie à manger la sienne. Je l'avais trouvé ici, en train d'essayer différentes armes.

- Tu l'aimes.

- L'ancien Peeta oui, mais le nouveau moi, non. Je n'ai plus de sentiments pour elle j'ai tout oublié.

Il a l'air désespéré, si faible et si fragile. On dirait un enfant. Il me regarde avec ses grands yeux bleus, attendant une réponse. Je me rapproche un peu de lui et serre sa main dans la mienne.

- Ton cerveau a oublié mais pas ton coeur. Il te faudra du temps c'est vrai mais ça reviendra, peut-être même sans t'en apercevoir, il faut que tu les cherches.

- Si seulement c'était aussi simple, dit-il avec un petit rire sans joie. Tout le monde à beau me dire qu'elle m'aime, qu'elle m'a sauvé la vie, que nous sommes fait l'un pour l'autre, je n'arrive pas à les croire. Comme si il y a quelque chose en moi qui la repousse.

- Mais tu as revu vos jeux non ? Tu as bien vu tout ce qu'elle a fait pour toi ?

- J'ai eu l'impression de voir une mauvaise comédienne, murmure le blond en secouant la tête

- Oh ça l'était, ça l'est toujours, Katniss n'est pas vraiment fait pour être actrice mais elle s'est fait prendre à son propre jeu, disons qu'elle s'est tellement impliquée dans son rôle qu'elle a finit par réellement tomber amoureuse de toi. Et puis, pour être honnête c'est très dur de résister à ton charmes petit boulanger !

Je lui sourit et lui donne un coup d'épaule. Il me regarde, l'air toujours dubitatif mais avec un léger sourire aux lèvres.

- Ca fait bizarre non ? demande tout d'un coup Beetee, rompant le silence. De n'être plus que trois.

Je ne réponds pas tout de suite et fixe mon plateau-repas, dont j'ai vidé la moitié en trente secondes. Cela fait quatre, non, cinq jours que Peeta est partit. Depuis pas de nouvelles. Le pire c'est qu'il me manque. Je m'y attendais, après tout, j'ai été collée à lui depuis son arrivé mais je ne pensais pas que ce serait à ce point là. Des fois, lorsque je marche dans les couloirs, je m'arrête et attends. J'attends qu'il surgisse d'un coup à côté de moi comme il sait si bien le faire et m'entraîne dans une conversation sur le dernier souvenirs qui lui est revenu. J'attends sa présence rassurante, ses sourires compréhensifs lorsque je lui livrais une confidence, même sans importance. J'attends de voir ses cheveux blonds et ses yeux bleus, d'entendre sa voix calme et de sentir ses mains fermes lorsque je sentais mes jambes faiblir. J'attends juste de voir mon ami. mais rien.

Il n'est pas mort. Aucun d'eux ne sont morts, sinon, il est évident que le Capitole aurait sauté sur l'occasion pour prévenir tout Panem de la manière la plus délicate qui soit. On voit des spots pro-rebelles tous les jours. Mais c'est toujours la même chose: Katniss, Peeta, Gale, Finnick et les autres bombardant quelques maisons, fusillant quelques rues mais rien d'autre. Pas d'adversaires en face d'eux. Est-ce une bonne chose ? Je ne sais pas.

Annie ressemble à une morte-vivante. Avant, elle avait Peeta pour s'occuper, elle essayait de lui faire revenir la mémoire et il lui faisait la lecture, lui racontait des histoires où tout allait bien dans le meilleur des mondes. Maintenant, elle passe ses journées cloîtrée dans sa chambre, amorphe. Elle fixe les affaires de Finnick comme si elle s'attendait à ce qu'il débarque d'un instant à l'autre avec son grand sourire et ses yeux rieurs et qu'il la prenne dans ses bras.

Mais on sait tous que ça n'arrivera pas, ou du moins pas avant un long moment.

Je me sens inutile. je passe les journées allongée dans mon lit à penser. Ma place n'est pas ici, elle est là-bas avec eux, je devrais tirer sur des fenêtres avec le reste de l’escouade au lieux de rester là. Immobile, inutile. C'est un sentiment qui vous prend aux tripes et qui vous les retournent, ça vous envahit, vous bouffe de l'intérieur, lentement, douloureusement. Ça laisse un goût amer sur le palais.

Je ne sers à rien.

Je compte les jours avec précision sur un calendrier qu'Haymitch m'a donné. une croix verte quand tout se passe bien et sinon, une rouge. J'attends que Coin me convoque, me dise de me préparer pour aller rejoindre les autres. Mais elle ne le fait pas. Je suis prête, elle le sait mais elle se venge des menaces que je lui ai faite. Par sa faute, je m'embourbe dans ce sentiment d'impuissance, je suis une loque, tout juste bonne à compter les jours qui défilent.

Mais tous les jours, il y a cette petite lumière qui vient me remonter à la surface. Prim. Elle apparaît, vêtue de l'uniforme des infirmière, me prend le bras et me sort de ma léthargie. Elle me balade à travers le District, parfois dehors et me raconte ses journées. Le soir, on se regroupe, Beetee, Annie, Prim et moi. Et son chat. Une enflure ce chat. Je l'aime bien. Je crois que lui aussi. Des fois, on passe de longue minutes à se défier du regard. Je ne baisse jamais les yeux et j'ai cette impression qu'il sourit, un grand sourire comme si c'était devenu un psychopathe. Mais à chaque fois que je me perd dans ce labyrinthe de Dédale qu'est le District 13, c'est toujours ce foutu chat qui me retrouve en premier. Annie l'aime bien aussi, à mon avis c'est parce que son poils roux lui rappelle Finnick, c'est bien tout ce qu'ils ont en commun, j'ai jamais vue un chat aussi moche.

Malheureusement, Prim passe le plus clair de son temps avec sa mère et les autres médecins. Alors, pour éviter un maximum de déprimer seule dans ma chambre je m'entraîne, encore et encore. Ça m'occupe les mains. Mais pas l'esprit. Ma tête est une prison, j'en viens presque à regretter les tortures du Capitole, à cette époque je souffrais trop pour penser à autre chose qu'à la douleur.

Il y a Haymitch aussi. Ah, Haymitch je l'ai toujours apprécié ce type, Fin dit que c'est parce qu'on se ressemble, je n'ai jamais vraiment su comment le prendre. Il est dans le même état que moi, une loque inutile et en plein sevrage alors on se comprend et c'est déjà beaucoup.

- Oui, finis-je par dire en passant mon doigt sur le rebord de l'assiette pour y récupéré la sauce. Ça fait bizarre

Au loin, Sae Boui Boui me fait un clin d’œil, c'est elle qui s'est arrangée pour que nos repas soient un peu plus comestibles. On l'a entendu hurler sur Coin dans tout le district.

- Mais on n'est pas que trois.