Cataleya Participe à la Moisson
Messages : 115 Date d'inscription : 04/09/2012 Age : 29 Localisation : Nourrissant sa vache, dans le district Dix
| Sujet: Mémoires d'une tribut - la première Expiation Dim 3 Fév - 17:02 | |
| Bonjour à tous, Donc voilà, cela fait déjà quelques mois que j'avais entamé l'écriture d'une fanfiction basée sur les Hunger Games. En réalité, cette fanfiction raconte l'histoire du personnage que j'incarne dans une websérie française qui s'inspire de Hunger Games : Expiation. Pour en savoir plus à propos de cette websérie, rendez-vous sur cette [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]. Cette fanfiction s'inspire librement du scénario écrit par Lexane Sirac, réalisatrice d' Expiation. Bien entendu, mes écrits reprennent en partie le scénario original afin que les liens soient logiques. J'espère que vous m'avez comprise. Dans le but de ne pas faire de spoil sur la websérie, je poste uniquement certains chapitres... J'essayerais de poster régulièrement des chapitres, mais il faut le dire : je n'écris pas très vite. Et comme je l'ai dit au-dessus : je ne posterais qu'une partie des chapitres pour éviter de vous spoiler sur la série. Je suis ouverte à toute critique, qu'elle soit positive ou négative. Mais s'il vous plait, faites une critique construite en expliquant bien qu'est-ce que je pourrais améliorer. Merci et bonne lecture! ____ Mémoires d'une tribut Chapitre 1 :- Spoiler:
Un beuglement déchirant me réveille en sursaut. Je me redresse, sors précipitamment de ma paillasse puis dévale les marches en bois jusqu’à la pièce principale. Je jette un regard circulaire autour de moi. Personne. Tout le monde est sûrement déjà levé à cette heure-ci. Et surtout en ce jour spécial. Rien qu’à cette pensée, je me raidis. Je n’aime pas du tout ce jour de l’année. J’ouvre la porte de l’unique meuble en bois de la pièce, qui nous sert de garde-manger, et en sors une poignée de plantes pour me faire une infusion. Nous n’avons plus grand-chose à manger ces temps-ci. Rude période. Il reste un peu d’eau dans la bassine. J’y plonge un bol en bois puis me prépare mon infusion. Mon ventre crie famine. Mais je dois attendre ce soir. Quand cette fête sera terminée, nous mangerons tous ensemble pour fêter la fin de cette journée. Enfin, si quelqu’un de la famille n’a pas été choisi. Nous sommes encore trois enfants à être éligibles. La plus grande de nous quatre a vingt ans. Elle travaille donc avec mon père, dans les prés. Enfin, si on peut appeler ça comme ça. Disons que c’est plus une étable. Voire même une grange. Nous sommes six en tout à vivre sous le même toit. Dans cette bicoque qui tombe en ruine. La cahute se situe dans le quartier du district que l’on surnomme La Prairie. Ne croyez pas qu’il s’agisse un endroit paradisiaque où poussent toutes sortes de belles plantes et de buissons. Ca, c’était avant. Avant les Temps Sombres, avant la guerre civile qui ébranla le pays. Il y a de ça un peu plus de vingt-cinq ans. Je me souviens encore de la voix grave du maire du district lorsqu’il récite le même discours à propos de la guerre civile qui a opposée les treize districts au Capitole :
« Guerre. Terrible guerre. Treize districts se sont rebellés contre le pays qui les a nourris, aimés, protégés. Quand les traîtres ont été vaincus, nous avons juré en tant que nation que plus jamais nous ne connaitrions cette trahison. Et ainsi il a été décrété que chaque année les différents districts de Panem doivent offrir un courageux jeune homme et une courageuse jeune fille pour se battre à mort dans un spectacle réclamant honneur, courage et sacrifice. »
Toutes les années le même discours, le même jour. Je connais les phrases par cœur. J’en ai un peu ma dose, à vrai dire. Mais je fais comme si. Je m’efforce de me fondre dans la masse. Pour qu’on ne me repère pas. Surtout qu’en ce moment, je ne dois absolument pas sortir du lot. Je ne veux pas que ça soit moi qui soie envoyée au Capitole.
Je me souviens du soir où le nouveau président, Coriolanus Snow, a annoncé le fonctionnement de la Moisson de cette année. Car oui, cette année n’est pas comme les autres. Nous avons droit à la première sécession des jeux d’expiation. Plus communément appelé l’Expiation. Nous sommes donc à la première Expiation. Chaque Expiation se passe tous les vingt-cinq ans après la défaite des districts. Le Capitole dit que c’est pour fêter le rassemblement de notre nation, Panem. Nous étions tous sur la place publique, devant le palais de justice, à fixer l’énorme écran qui diffusait l’explication de la première Expiation depuis le Capitole. Tous tendus, à se serrer, à se tenir les mains. Personne ne parlait. On entendait même le bruit des cloches des vaches au loin. Nous étions obligés de se retrouver là, ordre du maire. D’un coup, le sceau de Panem s’afficha sur l’écran géant et l’hymne envahit la place entière. Le son était vraiment trop fort. Au moins, on entendait. On vit Snow monter lentement sur une estrade, d’un pas magistral. Notre nouveau Président. Il succédait à son défunt père, mort d’une fulgurante maladie dont j’ai oublié le nom. Un petit garçon blond s’avança vers Snow et lui tendit une boîte. Celle-ci semblait être en bois massif provenant du district Sept. Le Président saisit une petite enveloppe, l’ouvrit puis lut à voix haute : - Au 25ème anniversaire des Jeux, afin que les rebelles n’oublient pas qu’ils avaient choisi de verser le premier sang, chaque district tiendra une élection et votera pour les tributs qui le représenteront. C’était comme si je venais de me prendre un coup de massue derrière la tête. Notre sort était entre les mains de nos parents, ceux qui se sont en grande partie battus contre le Capitole. Pour la liberté de leurs futurs enfants. Ils ont échoué, ils doivent en payer le prix. Une nouvelle fois. Énorme injustice. Il a fallut quelques secondes pour que certaines personnes comprennent la nouvelle. Puis des femmes se mirent à pleurer, à hurler. Une autre s’agenouilla au sol, la tête entre les mains. Grosse détresse parmi les habitants du district Dix. Je ne savais pas comment réagir. Je n’osais même pas regarder mes parents. Je les imaginais tendus, fixant droit devant eux. Essayant de rester forts devants leurs enfants, de ne pas trahir leurs émotions. Ma mère, les larmes aux yeux. Je sentais la main de mon père broyer la mienne. Soyons forts. J’imaginais les adolescents dans les districts des carrières, commençant déjà à se faire de la publicité afin se faire élire. Je ne comprends pas bien le comportement de ces personnes qui trouvent glorieux d’aller dans l’arène. Ils aiment gagner, c’est tout ce que je vois. Ils y vont uniquement pour la gloire. Alors que nous, dans notre district, nous faisons tout pour ne pas partir au Capitole. Décidément, nous étions tous unis lors de la guerre civile, mais les mentalités ont bien changées en si peu de temps.
Depuis cette rude soirée, un mois s’est écoulé. Personne ne parle de cette Moisson, tant mieux d’ailleurs. Quand je vais à l’école, j’entends certaines messes basses. Des coups par derrière se montent déjà. Des clans se montent pour voter pour l’enfant d’untel. Les adultes sont forcés de voter pour leurs tributs, certains ont l’air de se délecter de ces créations d’embrouilles.
Je prends mon bol puis vais m’asseoir sur le devant de la maison. Les pieds dans la boue. Il fait beau, les oiseaux sont de sortie. On entend quelques beuglements dans le hangar le plus proche. Dommage qu’aujourd’hui soit le jour de la Moisson. J’aurais bien voulu aller avec Mélisandre m’asseoir dans un pré à l’abris de tout le monde, parler de tout et de rien. Mél’, comme je la surnomme, est ma seule amie. Elle est bien la seule qui est venue faire ma connaissance lors de notre entrée à l’école. Les autres m’ignoraient complètement, et continuent toujours. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Au début, c’était assez dérangeant puis on finit par s’y habituer. En réalité, je préfère qu’ils m’ignorent plutôt qu’ils m’harcèlent à longueur de journée. J’aime bien mon anonymat finalement. Peut-être qu’il m’aidera à ne pas être élue. Je l’espère bien. Je sirote mon pauvre repas. Une brise légère me caresse le visage, les rayons du soleil me réchauffent les joues. J’inspire profondément. J’aimerai voir la mer. On en a parlé très rapidement à l’école un jour, lorsque l’on étudiait la spécialité des différents districts. Le district Trois est spécialisé dans la pêche, seuls ses habitants ont accès à la mer et aux lacs. Mais c’est impossible que j’aille voir la mer, je le sais bien. Je ne suis jamais sortie en-dehors du district Dix et j’y resterai très probablement jusqu’à la fin de mes jours. Sortir du district sans autorisation est interdit, si nous le faisons nous sommes abattus sur le champ. Les pacificateurs ne nous laissent aucune seconde chance. Nous sortons du district uniquement si on est choisi pour participer aux Hunger Games. J’arrive à la fin de ma boisson, j’ai toujours faim. Je vais reposer mon bol sur la table. Les quelques galettes de farine posées sur le rebord d’une étagère attirent mon regard. Je dois attendre ce soir. Malgré tout, je laisse mes doigts glisser dessus. Les galettes sont rugueuses et noires. La farine n’est pas de bonne qualité, mais c’est la seule que le Capitole nous envoi pour manger. Nous devons faire avec. Et dire que nous avons plusieurs vaches à notre disposition, mais nous ne pouvons même pas prendre un peu de leur viande ni même de leur lait. L’intégralité est envoyée au Capitole, qui nourrit d’abord sa population avec puis distribue le reste aux douze districts. Nous mourons silencieusement de faim. Un craquement de branche me fait sursauter. C’est mon père et ma sœur qui reviennent de la grange. Il doit être environ midi, je n’ai même pas entendu la cloche qui annonce la pause de midi. Après un bref salut à ma famille, je vais à l’étage me préparer. La même robe, la même coiffure. Je ne fais pas dans l’original, mais à quoi ça sert de se démarquer ? Le Capitole qui considère la Moisson comme étant une fête, je prends plus ça pour une sentence de mort. Depuis le lancement des Hunger Games, aucun adolescent du district Dix est revenu. Nous ne sommes pas un district de vainqueurs, loin de là. Chaque année, voir des personnes que l’on connaît plus ou moins partir au Capitole. Au début, cela fait mal puis on finit par s’y habituer un petit peu. Je finis par me dire que le fait de n’avoir qu’une seule amie n’est pas si terrible que ça. Si je ne m’attache pas aux autres jeunes de mon âge, cela m’éviterait d’avoir le cœur brisé si l’un de mes amis était tiré au sort. J’enfile ma robe marron, taillée dans un tissu épais. Elle commence à être trop petite pour moi, mais il faut faire avec. Nous faisons tous avec ce que nous avons. La « débrouillardise » comme on disait avant, maintenant c’est devenu mon quotidien. Je me dirige vers le seul miroir de la pièce, il est fêlé et on ne se voit plus très bien dedans. Mes cheveux noirs sont trop courts à mon goût pour les attacher. Je ne fais que les coiffer vaguement et les laisse détachés. Pas besoin d’en faire plus. Dehors, j’entends une voix familière crier : - Agatha ! Comme tous les ans, Mélisandre vient me chercher devant chez moi et nous allons ensemble au point de rendez-vous. Le lieu où ils font la Moisson, la place centrale du district, juste devant le palais de justice. Je descends les escaliers puis vais rejoindre mon amie. Elle aussi a revêtue sa « robe fétiche » comme elle dit, la robe de sa défunte mère. Comme tous jours, elle a rassemblé ses cheveux en queue de cheval. Un simple petit sourire crispé suffit pour nous saluer. Nous ne sommes pas vraiment d’humeur à rire. Ma famille me rejoindra sur place, nous préférons y aller chacun de notre côté. Ma mère accompagnera très certainement les deux plus jeunes. Tout du long du trajet, nous ne parlons pas. Je shoote de temps en temps dans un caillou. Nous croisons quelques personnes de l’école, ils ont fait un petit effort pour bien s’habiller. Mais leurs visages ressemblent un peu à nos vaches que l’on s’apprête à abattre. Une sorte de terreur que l’on essaye de cacher comme on peut. Plus on se rapproche de la place et plus le flot de personnes se fait compact. Je me sens toute petite, je marche en fixant mes pieds. Pourvu que je n’ai pas eu de vote en ma faveur. Ou plutôt, en ma défaveur. Ni même de vote pour les quelques personnes qui me sont chères. Comme à l’accoutumée, nous faisons la queue pour nous faire recenser. Mes lèvres sont très sèches, je n’ai pas parlé depuis ce matin. D’habitude, les gens nous demandent combien de papiers avons-nous dans la boule. Mais là c’est difficile à dire. Le dépouillement se fera devant nous tous, ça sera long avec les milles habitants adultes du district. Une fois inscrite sur la liste, un pacificateur me saisit par le coude sans ménagement et m’emmène à mon emplacement. A droite de l’esplanade du palais de justice, tout devant. Vu que je m’approche de la dernière année d’éligibilité, enfin. La place est noire de monde. J’ai perdu de vue Mélisandre, elle va sûrement me rejoindre dans quelques secondes. Nous avons le même âge. Je ne vois pas non plus ma famille, je les retrouverai à la fin de la cérémonie. Le stress commence par me gagner. Je finis par me saisir le coude droit avec ma main gauche. Le temps semble passer très lentement. Pourvu que le dépouillement ne dure pas une éternité… Les retardataires se font recenser et se mettent à leur emplacement. Plusieurs longues minutes s’écoulent. Nous ressemblons à des animaux enfermés dans des enclos, impossible de sortir de là. Il n’y a pas d’ombre en plus. Nous sommes en début d’été. Il doit être environ deux heures de l’après-midi quand enfin, la porte du palais de justice s’ouvre. Le maire ainsi que ses conseillés en sortent. Il va vers le micro situé au bord de l’esplanade puis commence son discours à propos de la rébellion des districts et de la création des Hunger Games. Je récite les phrases dans ma tête, rien n’a changé. Vient en suite l’hôtesse du district Dix, dont j’ignore le prénom. Mais je préfère ne pas le connaître en réalité, surement un de ces noms exotiques que les gens donnent à leurs enfants au Capitole. Je les trouve ridicules, de ceux que j’ai pu entendre. Cette année, notre hôtesse a revêtue une robe couleur émeraude. D’une matière assez étrange qui fait des plis un peu de partout. Personnellement, je trouve cette robe hideuse. Surtout que celle-ci ne met pas notre hôtesse en valeur, elle moule énormément ses rondeurs. Elle se dirige vers le micro puis entonne d’une voix aigue : - Bienvenue, bienvenue ! Joyeux Hunger Games, et puisse le sort vous être favorable ! Le temps est venu de sélectionner le courageux jeune homme et la courageuse jeune fille qui représenteront le district Dix aux vingt-cinquièmes Hunger Games. Comme d’habitude, les dames d’abord ! Puis va vers la boule en verre située à ma droite. Toujours ces mêmes rituels. Sauf que cette fois-ci ce n’est pas vraiment comme d’habitude, un homme s’approche aussi de la boule puis plonge sa main dedans. Ce doit être un conseiller du maire. Il en tire un petit papier blanc, l’ouvre avec précaution puis note un nom sur un grand tableau situé derrière lui. Il nous fait dos donc impossible de voir quel nom a été noté. Puis, il s’écarte d’un pas sur le côté. Le prénom m’est inconnu. Mais je vois quelques têtes se tourner à la recherche de la pauvre fille. Le ballet continue ainsi durant plusieurs minutes, dans un silence le plus total. L’homme et l’hôtesse se relaient auprès de la boule en verre. Notre district ne possède pas de vainqueur actuellement. Nous ne sommes qu’une population d’affamés sans expérience dans le combat, comment peut-on espérer gagner ? De la chance et l’aide des sponsors ? Et encore… En plusieurs minutes, quelques prénoms ont été notés sur le tableau. Je les lis rapidement puis je m’arrête sur l’un d’eux. Non. C’est impossible… Le prénom de ma Mélisandre y est noté, il y a eu cinquante votes contre elle actuellement. Comment est-ce possible ? Je la cherche autour de moi. La foule est tellement compacte, moi avec mon mètre cinquante. Impossible de la trouver. Tout le monde regarde le tableau sans bruit. J’ai presque l’impression d’être sourde. De temps en temps, on peut entendre des paroles basses lorsqu’un nouveau nom est marqué au tableau. Nous restons comme ça, en plein cagnard, durant plusieurs minutes. Cette Moisson est beaucoup plus longue que les précédentes. Je ne fais plus vraiment attention au dépouillage. Je n’ai qu’une envie, m’assoir par terre ou rentrer chez moi. Enfin, les va-et-vient se terminent. L’hôtesse se dirige de nouveau vers le micro puis entonne : - Les comptes sont faits et notre tribut femelle est… Mélisandre Sorel. Je relève vivement la tête. Pardon ? J’ai bien entendu… Ma Mélisandre, envoyée au Capitole. Comment est-ce possible ? C’est comme si je venais de me prendre une claque en pleine figure. Ma Mel’ qui court à la catastrophe. A sa propre perte. Elle ne fera jamais le poids face à tous ces tributs, ces carrières. Je sens mon cœur battre à tout rompre, mais je ne sais pas quoi faire. Je reste figée. J’entends des pas derrières moi. Surement les filles qui s’écartent pour laisser passer mon amie. Ma seule amie. Personne ne parle. Je vois Mélisandre dans l’allée centrale, escortée par les pacificateurs. Aucune issue pour s’enfuir. Le piège se referme déjà sur elle. Le Capitole nous aura jusqu’au dernier… Quoiqu’il advienne, il a sa revanche. Toute pâle et tremblante, elle monte sur l’estrade puis rejoint l’hôtesse. La voix cristalline de l’hôtesse résonne dans toute la place : - Y a-t-il une volontaire pour Mélisandre Sorel ? Chapitre 2 :- Spoiler:
Mon sang ne fait qu’un tour. C’est le moment ou jamais. Tremblante, je lève la main en l’air et crie : - Je… je me porte volontaire ! Des murmures se font entendre. Je crois que je suis la première volontaire de notre district. Je sens tous les regards se tourner vers moi, l’inconnue de tous. Agatha l’ignorée, mais fidèle à son amie. J’espère que l’on retiendra cela de moi. Je signe mon arrêt de mort. Moi la petite, je doute très sincèrement que je puisse tenir longtemps dans l’arène. Mais au moins, j’épargne mon amie. Les pacificateurs viennent me chercher et font le même rituel que pour Mélisandre. Ils m’escortent jusqu’à l’esplanade. Tout le monde regarde. Timidement, je monte les marches puis me dirige vers le micro. Je ne peux pas parler. Ma gorge est sèche. Que dire à toutes ces personnes qui sont face à moi ? Courage. J’ai les yeux pleins de larmes, mais je les retiens autant que je peux. Je pleurerai quand je serai seule. Je dois rester forte. Pour moi, pour Mélisandre, pour ma famille. Car dorénavant, ma vie a changée. Les habitants du Capitole commencent surement à faire leurs paris sur moi. Du coin de l’œil, je vois mon amie descendre en bas de l’esplanade. Je ne veux pas la regarder, sinon je sais que je vais craquer. J’ai signé mon arrêt de mort, mais au moins j’ai épargné mon amie. J’espère qu’elle pourra raconter cela à ses enfants, que j’ai été une amie fidèle jusqu’au bout. Mélisandre s’en va au fond de la place sans se retourner, rejoindre sa famille très certainement. Je m’attends à ce qu’on nomme le tribut mâle, mais un pacificateur me prend par le coude et m’entraine dans le hall du palais de justice. Sans me lâcher, nous montons un escalier puis il m’entraine dans une pièce. Je suis perdue dans ces longs corridors, toutes ces portes... Je n’arrive toujours pas trop à réaliser. J’ai épargné ma meilleure amie. Elle est saine et sauve maintenant. Je n’ai plus qu’à compter sur moi-même presque. Le pacificateur ouvre une porte qui donne dans une petite pièce, puis m’y jette violement dedans. Emportée par l’élan, je tombe à genoux sur un tapis. Il referme violement la porte. Je relève la tête et commence à scruter autour de moi, mes yeux s’habituent peu à peu à la semi-pénombre. Je m’étale sans ménagement sur le tapis. Sentir quelque chose de doux contre sa joue. Se laisser aller. Vider toutes les larmes de son corps. Autant en profiter, il doit s’agir d’un des rares moments de solitude que je vais avoir maintenant. Je serais sous les caméras. Ma vie est en jeu. Je pense à ma famille, comment ont-ils réagi ? De longues minutes s’écoulent. J’entends le grésillement des talkies-walkies des pacificateurs, juste derrière la porte. Je suis prise au piège. Toujours allongée sur le tapis, j’y passe ma main. Il est encore un peu frais. Fait à partir d’une fibre synthétique qui m’est inconnue. De temps en temps, j’attrape un fil et tire dessus. Je regarde dans le vide. Soudain, la porte s’ouvre. C’est Mélisandre. Je me redresse d’un coup. Ses yeux sont encore humides. Elle vient s’asseoir auprès de moi. Nous nous enlaçons durant plusieurs minutes. Souvent, je me dis que les paroles servent à pas grand-chose mais que nos gestes signifient autant. Nous nous comprenons, ni l’une ni l’autre ne veut parler. Je ne sais pas quoi dire de toute manière. Ma gorge est si sèche. Je sens une larme couler le long de ma joue. C’est pour elle que j’ai fait ça. Nous nous disons adieu silencieusement. Je plonge ma tête dans ses longs cheveux blonds, ils sont si doux. Elle va me manquer. C’est très certainement la dernière fois que je vois mon amie. Après, elle assistera impuissante à ma mort. La porte s’ouvre une nouvelle fois, c’est un pacificateur. - Fin des trois minutes. Mélisandre se redresse lentement. Il est difficile de nous séparer. Elle ne dit mot, mais ses yeux parlent pour elle. Parmi la détresse je peux y lire un message de remerciement. Elle est sincère. Elle va terriblement me manquer. J’ai tout fait pour la protéger, jusqu’au bout. Je vais me battre pour elle, je garde le peu d’espoir qu’il me reste. Je reste agenouillée seule sur le tapis. Personne d’autre ne vient me rendre visite, ce qui est assez étonnant de la part de ma famille. Seule, je me mets en position fœtale sur le tapis. Essayer de me faire toute petite. Comme quand j’étais plus jeune. Par habitude, je me mets en boule dans mon lit en hiver. Il fait tellement froid à la maison, à croire que l’on dort à l’extérieur. Il faut que je reste forte si je veux survivre un minimum. J’ai fait ça pour Mélisandre, je dois lui faire honneur. La porte s’ouvre de nouveau : - Debout ! Aboie un pacificateur. Je me lève comme je peux. A force de rester immobile, mes jambes sont lourdes. Tout en avançant, je me les masse un peu. Je n’ai le temps de faire que trois pas que le pacificateur me saisit par le coude et m’entraine avec lui. A croire que je suis trop lente pour lui. Tout est normal, je ne suis qu’une simple fillette pour lui. Rien d’autre. Une tribut maintenant, qui va combattre dans l’arène. Le pacificateur me tient beaucoup trop fermement. - S’il vous plait, vous me faites mal… - Tais-toi et avance ! Absolument pas commode. Je me résigne et le suit sans rechigner. Il fait des grands pas. A cause de ma petite taille, je suis presque obligée de trottiner à ses côtés. C’est une armoire à glace aussi accueillante qu’une porte de prison. Si j’essaye d’extraire mon bras de son emprise, je pense que je perdrais. Moi et ma force de mouche. Je n’ai toujours pas vu le garçon qui a été sélectionné. J’essaye de regarder autour de moi, mais le palais de justice est vide. Le pacificateur m’emmène vers une porte dérobée située à l’arrière de la bâtisse. Jusqu’à maintenant, je ne suis jamais entrée dans le palais de justice ; alors je le suis à la trace. D’un coup d’épaule, il ouvre violement la porte. Devant se trouve une voiture. C’est bien la première fois que j’en vois une. Dans le district, même les plus aisés n’en n’ont pas. Nous faisons tous les trajets à pied. De toute manière avec la boue et les cailloux quasi présents sur l’ensemble du district, nous n’avons aucun autre moyen de déplacement. La voiture est rutilante et semble provenir tout droit du Capitole. « Gentille attention » me dis-je. Le soleil m’aveugle, je l’ai en pleine face. Pas le temps de m’y habituer, le pacificateur m’entraine vers la voiture puis me lâche devant la portière. Celle-ci est grande ouverte. - Monte ! m’ordonne-t-il. Je m’exécute docilement. A ma gauche, je remarque l’hôtesse ainsi qu’un garçon. Le tribut masculin, le voilà donc. Il ne dit rien, il ne semble même pas m’avoir vu. Ou alors il est terrorisé ou semble déjà préparer sa technique de survie pour l’arène. De profil son visage ne me dit absolument rien. La voiture démarre, nous remontons le long des quelques rues pavées du District en direction de la gare. L’autre tribut ne parle pas du tout. Seule la voix de l’hôtesse emplit le petit espace. Elle parle de l’organisation de la semaine qui nous attend. Enfin je crois, je ne l’écoute pas non plus. J’observe à travers la vitre de la voiture. Nous allons plutôt lentement. La plus part des habitants du district sont regroupés sur le bord de la route, nous observant silencieusement. Il s’agit d’un des rituels obligatoires que le Capitole a mit en place. Seules les personnes qui doivent retourner travailler au près des animaux ne sont pas obligés d’y assister. Parfois, une caméra filme la voiture. Tout ça doit passer en direct sur tous les écrans de Panem. Nous approchons de la gare. La foule est de plus en plus dense. La voiture ralentit puis s’arrête en plein milieu de la route. J’aperçois le train un peu plus loin. Celui qui nous emmènera au Capitole. Un pacificateur s’approche de la porte, l’ouvre violement puis me fait signe de descendre. La marche est assez haute. Je saute les pieds joints dans la boue. Je sens le petit regard horrifié de l’hôtesse sur moi, qui provient directement du Capitole. Une des dernières fois où je fais ce que je veux. Je suis encore libre. Mais je suis observée. Un autre pacificateur me saisit par le coude, une nouvelle fois. Comme si j’étais incapable de marcher seule. Ou alors c’est une simple précaution envers les tributs pour les empêcher de fuir. Enfin avec cette foule et ces caméras braqués sur nous, difficile de fuir discrètement. Il y a un silence de plomb. Nous entendons uniquement nos pas et, au loin le bruit du bétail. Je regarde autour de moi. La foule s’écarte pour nous laisser passer. J’ai perdu de vue le garçon qui est désormais mon compagnon pour les Hunger Games, mais il est aussi mon adversaire. Il n’y a qu’une seule personne sur vingt-quatre qui va s’en sortir. Je préfère donc éviter de devenir son amie. Quitte à l’ignorer complètement. Le pacificateur m’entraine vers la porte du train. - Monte ! J’obéis. Je ne me retourne pas. Mais je sens quand même tous les regards tournés vers moi. On doit même me voir au Capitole. Je ne sais même pas si ma famille est là. Peut-être, je l’espère. J’arrive dans un couloir sombre, une porte à ma droite. L’hôtesse arrive derrière moi, le tribut masculin sur ses talons. D’une petite tape sur l’épaule, elle me fait signe d’avancer. Je fais un pas en direction de la porte. Celle-ci s’ouvre sans bruit. La technologie du Capitole. Une immense pièce s’étale sous mes yeux. Je ne sais pas où poser mon regard. Tellement de choses… On reconnaît les goûts du Capitole. De la nourriture en abondance, de quoi nourrir une famille complète durant un mois. Je ne pourrais même pas nommer tous les ingrédients qui ont été utilisés dans ces compositions. En tout cas, ce n’est pas de la simple farine gâtée. Des meubles raffinés. Du bois très bien travaillé, des tissus que je ne pourrais pas nommer. C’est vraiment autre chose que nos simples meubles en bois que l’on a dans la maison. Je prends le risque de laisser ma main glisser sur l’un des tables. C’est lisse, le bois semble être laqué. En même temps, la pièce me parait froide. Je ne suis pas chez moi, mais dans le monde du Capitole. A travers les vitres, je commence à voir les habitations s’éloigner. Nous sommes partis, je n’ai rien sentit. Le train se déplace silencieusement mais rapidement. Adieu la maison. Nous dépassons le centre-ville, les prés et la forêt s’étendent désormais sous mes yeux. Je me rapproche de la vitre et m’y accoude. Je regarde silencieusement les paysages défiler. Je ne fais plus vraiment attention aux personnes qui sont avec moi. Dans le reflet de la vitre, je distingue l’hôtesse qui s’est installée dans un fauteuil. Je ne vois pas l’autre tribut. D’ailleurs, j’ignore toujours son prénom. Le train ralenti un peu sur quelques mètres puis accélère de nouveau. Cela ne semble pas alerter l’hôtesse. Nous devons certainement passer la frontière du district. Quelques secondes plus tard, ma théorie est validée. Je distingue une haie de barbelés électrifiés qui s’étend sur plusieurs kilomètres. C’est certain, difficile de s’évader du district. Cette haie s’élevant à bien cinq mètres de hauteur. En plus, deux miradors surplombent le chemin de fer. A force d’être restée debout trop longtemps, mon dos commence à me faire souffrir. Je décide de partir à la découverte de ce train. De ce que j’ai pu vaguement entendre au district, chaque tribut a sa suite attribuée. Le seul détail, c’est qu’on ne m’a pas dit où était située la mienne. Je décide donc de me fier à mon instinct. Je finirai bien par trouver. Je me dirige donc au fond de la voiture, elle semble faire office de salle à manger. Je passe une nouvelle porte, celle-ci s’ouvre dans un silence qui m’est déstabilisant. Moi qui suis habituée à mes vielles portes qui grincent et au bois pourri. Je traverse un couloir sombre, très certainement un soufflet qui relie deux wagons. Je débouche dans une nouvelle salle. Cette fois, c’est le salon. Il est meublé de la même manière que la salle à manger : même bois, mêmes tissus. Mais la disposition est bien différente, et il y a un énorme écran noir au mur. Je crois qu’il s’agit d’une télévision. Je crois, je n’en ai jamais vu une de ma vie. Encore un de ces objets de luxe qui sont réservés aux habitants du Capitole. Même à l’école, nous n’en n’avons pas une. Je continue tout droit. Même si j’ai une forte envie de m’affaler sur un des canapés. Une nouvelle porte, un nouveau couloir. Cette fois-ci, je ne débouche pas dans une salle complète. Mais dans un long couloir recouvert d’une tapisserie rouge, ce qui donne un petit effet calfeutré. Je dois être dans la partie nuit. Une porte se trouve directement à ma gauche, je l’ouvre maladroitement. Une pièce tapissée de rouge, comme le couloir. Penché au-dessus d’un tiroir ouvert, je distingue le garçon qui m’accompagne. Surpris, il se redresse rapidement puis commence à ouvrir la bouche. Je le coupe : - Désolée, j’ai du me tromper... Dis-je en bredouillant. Puis referme assez sèchement la porte. Je continue à avancer dans ce long couloir. A travers les vitres je distingue le paysage qui défile rapidement. Nous sommes dans une forêt un peu sombre, je ne sais pas vers quel district nous nous dirigeons. Encore une porte et un couloir, à croire que ce train ne se termine jamais ! Je débouche dans un couloir aux mêmes dimensions que le précédent. Sauf que celui-ci a les murs recouverts de peinture grise. Tout est dans les tons noirs et gris, ce qui me plait plutôt même si je préfère le bois. Je pousse la porte située à ma gauche, elle donne dans une vaste pièce. Au fond à droite, je distingue un énorme lit qui semble très confortable. Je ferme la porte derrière moi puis me place face au lit. Me colle contre le mur, prends mon élan puis me jette à plat ventre sur le lit. Moment d’enfantillage, que ça fait du bien ! Et j’avais raison, le lit est extrêmement confortable. Avec une couette tellement épaisse. La couette que j’avais à la maison semble ridicule par rapport à celle-ci. Je me redresse puis me mets à sautiller sur le lit à pieds joints. Le matelas est lui aussi épais. Je n’aurais jamais pu me permettre de faire cela à la maison, avec la paille qui me sert de matelas et mon fin duvet. Je continue à sautiller joyeusement sur le lit. De petits cris de joie s’échappent de ma bouche. Soudain la triste réalité me rattrape : je suis tribut et je vais me battre aux Hunger Games. Toute ma joie retombe d’un coup. Je m’étale sur le lit, fixant le plafond. D’ailleurs, je remarque qu’il est blanc et que les murs sont gris. Dans les mêmes tons que le couloir, tout semble coordonné. Je me redresse un peu et prends appui sur mes coudes, j’aperçois un large miroir sur le mur d’en face. Sur celui à ma droite, une rangée de quatre petites fenêtres donnent vue sur le paysage qui défile. Des arbres et encore des arbres. Exténuée de cette longue journée, je décide de m’allonger habillée dans le lit afin de réfléchir un peu sur les semaines qui vont arriver. Je me sens bien crasseuse dans ces draps d’un blanc immaculé. Mais peut importe, autant profiter du temps présent. Mon temps est compté désormais. Je soulève la couette puis m’installe tranquillement dans le lit. La chaleur de la couette vient très rapidement au contact de ma peau. Sensation de tranquillité. Je fixe encore le plafond tout en songeant à ma famille, à mon amie. J’espère qu’il en est de même pour eux. A chaque seconde qui s’écoule, je m’éloigne un peu plus d’eux. De ce qui fut ma maison durant ces dix-sept ans. Jusqu’à maintenant, je n’ai toujours pas réfléchi à ma technique pour survivre dans l’arène. Nous n’avons pas de mentor vu qu’il n’y a pas eu de gagnant dans le district Dix, alors je ne peux que compter sur moi-même. Enfin je suppose. Je doute très sincèrement que l’hôtesse puisse m’aider en me conseillant pour survivre dans l’arène. Elle peut m’aider en m’apprenant comment me comporter durant les interviews, mais c’est à peu près tout. J’ai ma vie entre ses mains, c’est elle qui sera chargée de trouver des sponsors. Mais par rapport à moi-même, je doute avoir de réelles capacités pour survivre et même combattre dans l’arène. Au district nous n’avons rien qui puisse nous aider à survivre en milieu hostile ou même à nous battre. Nous ne faisons qu’élever du bétail. A l’école, nous apprenons juste comment élever ce bétail et tout ce qui s’y rapporte. Bien entendu, il y a un abattoir au district, mais seuls les majeurs peuvent aller y travailler. Là-bas, on leur apprend à manier un couteau pour découper la viande. C’est bien la seule sorte d’arme que nous pouvons manier dans notre quotidien. Nous ne possédons pas de centre d’entrainement par rapport aux districts des carrières. Pour ce qui est de la survie, je sais juste rationner. Je n’ai jamais appris à chasser. Je connais les rudiments pour ce qui est des parties comestibles du bétail, mais c’est tout. Non, décidément rien ne me prédispose à gagner ces Jeux. J’espère pouvoir apprendre tout ce que je souhaite lors de l’entrainement. Mais nous ne voyons pas cette période à la télévision, ni même la démonstration que le tribut doit faire à la fin de cet entrainement devant des juges. Pour à la fin avoir sa note. Je me demande comment est-ce que ça se passe… Mes yeux se font lourds. Le train semble ralentir, surement que nous arrivons à la gare d’un district. De nouvelles recrues, de nouvelles victimes.
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