[fanfiction] Hunger Games - PERFECT WEAPON

Dans le Discrict 5, lors des matinées, nous sommes plus habitués à l'orage. A la pluie. A toute cette hydrothermie qui fait tourner les machines. Mais alors que j'ouvre péniblement les yeux, toujours sur le toit sur lequel je me suis, en toute logique, endormie, j'ai la surprise de découvrir que ce n'est pas un gris sombre qui recouvre le paysage comme un couvercle, mais bien un bleu clair illuminé par les rayons du soleil. 
Engourdie et le dos en compote, je me redresse en position assise – j'avais bien eu l'intention de retourner me coucher passées les premières heures de la nuit, la veille, mais allez savoir comment, le sommeil semblait être venu à moi malgré ma nervosité. 
J'étire mes muscles douloureux et passe bien cinq minutes à arriver sur mes deux pieds. Remuant les bras et les jambes pour chasser les courbatures, je me dirige vers le velux encore entrouvert, donnant sur le dernier palier de l'escalier de mon immeuble : Alica. Je descend rapidement les échelons de métal, manquant de m'étaler par terre en me prenant le pied dans l'un d'entre eux, et trottine en silence jusqu'à la porte de ma chambre. 
Les immeubles de notre District sont plus souvent appelés Moulins qu'autre chose. En effet, quelques décennies plus tôt, de grandes palles semblables à celles des éoliennes étaient accrochées sur chaque toit pour produire de l'énergie destinée aux seuls habitants de par la force du vent. Désormais, nous n'y voyions plus que des panneaux à astres, c'est à dire fonctionnant grâce aux rayons du soleil et à la force magnétique de la lune. Ne me demandez pas comment cela fonctionne, c'est à en perdre la tête. 
Les 26 Moulin sont entassés sur les côtés d'une immense avenue, et rangés dans l'ordre alphabétique de leurs noms. Une rumeur stupide stipule que les premiers jouissent d'une meilleure hygiène, d'un confort absolu et d'une électricité quasi-illimitée. Je peux concevoir qu'étant donné l'interdiction d'entrer dans un immeuble dans lequel nous n'avons pas de chambre, il est normal que la vérité ait du mal à être rétablie. Mais tout de même : comme dans tous les autres Moulins, nous avons moins de 12 heures d'électricité – nos panneaux ne sont ni plus grands, ni plus productifs ; ça se voit, non ? – par jours, nos couloirs ressemblent à ceux de sous-marins de bois et nos portes à celles de coffres-blindés – fermables par les Pacificateurs si besoin. Mais je dois bien avouer une chose : la taille de nos appartemments n'a rien de criticable. Surtout depuis que moi et ma mère vivons seules...
Je secoue la tête, m'interdisant d'avoir une pensée ni pour Seen, ni pour mon père. 
Je n'ai pas beaucoupde souvenirs de ce dernier : d'après ce que je sais, il avait été porté disparu alors que je n'avais que trois ans. Néanmoins, la photo encadrée et posée sur la télé montre parfaitement que, malgré la différence d'âge, lui et Seen auraient pû être frères. J'ignore si cela a un rapport avec le Gène Artificiel que mon grand-père avait amené dans la famille, mais tous, de ce côté paternel, ont le même visage, les mêmes cheveux blonds platine et les mêmes iris d'un bleu électrique. Et je ne fais pas exception à la règle, malgré la différence de sexe. 
Le pas lourd, j'ouvre l'épaisse porte de métal et entre dans l'appartemment. A peine ai-je passé le perron que j'entend ma mère sortir de la petite cuisine jumellée à la salle à manger. 
_Zée ? Appelle-t-elle avant d'apparaître dans l'encadrement de la porte. 
_Hm ? 
Ma mère jette un coup d'oeil à l'unique pendule de la maison avant de tourner vers moi un regard inquiet. 
_Tu as vu l'heure ? 
Je m'apprête à répondre, quand le message qu'elle cherche implicitement à me faire passer m'éclate à la figure. 
La Moisson. 
Sans répondre, je rejoins ma chambre en deux enjambées sur le parquet grinçant, et ferme rapidement derrière moi. Une robe grise à bretelles est déjà posée au pied de mon lit, froissée et usée – mais qui, cependant, fera parfaitement l'affaire. 
En un éclair, je retire mon pyjama et l'enfile, puis attache mes cheveux sur le haut de ma tête, faisant fi des quelques mèches rebelles qui retombent sur mon front avec impétuosité. 
Puis, en sortant, je donne un grand coup dans la porte qui part – littéralement – exploser contre le mur. 
Celui d'en face. 
Je reste un instant immobile à observer tout un pan du mur à moitié écroulé, de la poussière et des morceaux de béton tombant au sol. Aussitôt, ma mère soupire en constatant les dégâts. 
_Ce n'est rien. Nous réparerons ça ce soir...
Je sais qu'elle a commencé à prendre l'habitude de mes maladresse quotidiennes. C'était d'ailleurs déjà la même chose avec Seen... Mais, en général, elle ne se contente pas de regarder en haussant les épaules. Pourtant, je parviens à comprendre qu'un jour de Moisson n'est pas le meilleur moment pour se disputer pour une simple bêtise de ce genre. 
Une fois de plus, je maudis le Gène Artificiel de grand-père. 
Après avoir constaté l'heure, je passe dans la cuisine me saisir d'un morceau de pain – assez dense, mais remplissant divinement mon estomac creux. Puis je me dirige vers la porte d'un pas lent. 
Ma mère s'avance en lançant un désinvolte « A tout à l'heure ». Cependant, je ne peux m'empêcher de la serrer dans mes bras avec ferveur, sachant ce qu'elle ne sait pas : que ces jeux sont pour moi. Elle me tapote le dos, ajuste ma coiffure, place quelques mèches blondes derrière mon oreille, et me laisse partir.
En descendant l'escalier, mon coeur se serre. J'ai toujours détesté ces marches raides, cette cage à ascenceur vide depuis des décennies et ces corridors mal éclairés. Cependant, la peur de ne jamais les revoir fait naître en moi une nostalgie que je n'aurais pas crue possible. Je croise d'autres habitants d'Alica s'en allant participer à la Moisson, mais n'ayant jamais créé de liens avec un seul d'entre eux, je ne leur adresse pas la parole et rejoins la rue en silence. 
Le soleil m'éblouit quelques instants – l'intérieur des Moulins est rarement lumineux – mais je ne tarde pas à entammer la route. L'Hotel de Justice, surplombant la Grande Place, est à l'autre bout de l'Avenue. 
C'est le seul quartier relativement riche qui soit présent à l'intérieur de la chaîne de centrales électriques. Avec, on ne compte que les 27 Moulins et les magasins présents à leurs rez-de-chaussées. Puis le District est entouré d'une fine banlieue, composée du quartier des vainceurs, où vivent les survivants des Hunger Games, les maisons du maire et de sa famille, de certains commerçants et des Techniciens Inventeurs – soient les uniques techniciens importants du District. 
Nous n'avons pas besoin de beaucoup d'ouvrier, dans les centrales, ce qui contraint les hommes à remplir des travaux de Techniciens – qui consistent, en gros, à réparer ou à entretenir les machines. Les formations sont apparemment très sommaires, sauf quand on a l'intention de devenir Ingénieur : ces derniers, en améliorant tout ce dont le District avait besoin, gagnaient bien leur vie ainsi qu'une place dans la Banlieue. 
Malgré l'absence de véhicules, je marche sagement sur le trottoir : depuis toute petite, j'ai reçu les ordres de mes parents de ne pas me faire remarquer par quelqu'infraction que ce soit, importante ou non. Je comprend désormais pourquoi : Ils saisiraient la moindre occasion qui se présenterait pour se débarasser de moi. Raison pour laquelle je met encore plus de coeur dans le respect des loies. 
La rue menant à la Grande Place est barrée par une rangée de comptoirs où des employés du Capitole, capitale de Panem et, à mon humble avis, de la folie urbaine, recensaient chaque enfant qui passait. Après avoir fait la queue quelques minutes, je m'avance, et un homme à l'air snob me demande mon nom. Quelques secondes après le « Zée Silverlight » que j'éructe d'une voix qui se veut forte, mais qui en réalité ne fait que trahir ma nervosité, ma photo et quelques informations me concernant apparaissent sur l'écran en face de lui. Comme chaque employé, chaque année, il fronce les sourcils : 
_17 ans ? 
J'acquiece, m'autorisant un levé d'yeux au ciel excédé qui, manifestement, lui échappa, et tendit la main afin qu'il face perler une goutte de sang au bout de mon doigt permettant d'inscrire mon empreinte digitale sur un cahier. 
Avec le temps, j'ai commencé à m'habituer à ce que mes interlocuteurs me donnent, physiquement, trois ans de moins que mon âge réel. 

Je m'avance dans la foule d'enfants de plus ou moins mon âge, avant de rejoindre le rang des « dix-sept ans ». Malgré les têtes qui me cachent complètement la vue, je ne proteste pas : voir l'organisatrice appeler les tributs ayant une chance sur vingt-quatre de mourir ne m'a jamais ravie. 
Nous patientons quelques secondes avant l'arrivée de Titannia Statty. D'après les écrans géants montés sur les colonnes de l'Hotel de Justice, je constate qu'elle a remplacé sa chevelure verte par une coiffure complexe d'une rouge soutenu. Ses faux cils font chacun la longueur d'un doigts, le maquillage étalé sur ses paupières me rappelle vaguement une fine couche de confiture : quelle classe – pour un membre du Capitole, j'imagine. 
L'hymne retentit, et un court-métrage relatant le passé de Panem ayant engendré les Hunger Games nous apparaît : la Révolution, la répression du Capitole et sa punition pour toutes les générations à venir. Mais comme les quatre années précédentes, je ne peux m'empêcher de penser, lors de la citation de la Répression, aux cinq-cent mutations génétiques, à formes d'hommes ou de femmes, déployées dans les District pour piéger les habitants des façons les plus cruelles qui soient. 
Je crois qu'au début, elles étaient réellement humaines : des bébés, comme chacun de nous l'avons été. Mais après des modifications qui avaient mis des années à être développées convenablement, elles étaient devenus de véritables machines de guerre : belles aux yeux des habitants de Panem, fortes physiquement, dotées d'une régénération accélérée des tissus et d'une résistance aux poisons – on leur avait implanté le Gène Artificiel, qui avait définitivement transformé la totalité de leur corps, aussi sûrement que s'enflamme une traînée de poudre. 
Néanmoins, jamais personne n'avait entendu parler de ce type d'humain artificiel plus loin que dans les Dictricts 2, 5 et 7 – les plus proches du Capitole. Certes, il y a des possibilités pour que ces histoires, relatées par mon père à moi et à Seen, aient été falsifiées au cours des années. Cependant, je n'ai aucune raison de ne pas y croire. 
La vidéo, et l'instant de répit aux battements de mon coeur, prend fin. Titannia lance quelques mots qui peinent à atteindre mon cerveau, et s'avance vers une large sphère de verre, à sa droite, ouverte en son sommet. Elle y plonge une main inquisitrice, qui plane quelques instants au-dessus des centaines de morceaux de papier blancs pliés et réunis là. Ses doigts se mouvent avec lenteur, et la longueur de ses ongles écarlates me fait malgré moi penser aux serres déployées du plus ignoble des rapaces. 
Je suis terrorisée. 
La peur que j'étais parvenue à refouler au plus profond de mon être depuis mon réveil, ce matin, refait violement surface. Je ne peux calmer les emballements de mon poul ni les maux de mon ventre, de mon estomac qui se crispe, se tord et se retourne. 
Si j'en crois les propos de mon frère, un an plus tôt, il n'y a aucune chance pour que mon nom ne soit pas tiré, aujourd'hui. Cela vaut sans doute mieux : je vais mourir dans l'arène à la place d'une autre innocente, tandis qu'échapper aux Jeux ne me mettrait pas forcément en sécurité.
Mais je n'ai pas envie. 
Pas envie d'aller me faire entraîner, noter, interviewer et balancer au milieu de 23 autres malheureux élus. Je ne veux pas parader devant des milliers d'yeux bordés de faux cils immondes aux iris teintes d'admiration, d'amusement et d'exitation pour tous ces morts. 
Je me souviens avoir été soulagée, l'année dernière, lorsqu'à mes oreilles était parvenu un nom féminin qui n'était pas le mien. Mais, l'instant d'après, c'était celui de Seen qui résonnait entre les murs de la Grande Place, et le chagrin et la peur m'avaient envahie. J'étais terrifiée à l'idée que mon frère puisse mourir de la main d'un autre adolescent ; j'en viens à me promettre, si je suis sélectionnée, de ne jamais essayer d'attenter à la vie des autres tributs – ce ne sera sans doute pas le contraire qui me fera survivre. 
Le nom est tiré ; Titannia s'en retourne vers le micro, en levant le papier encore plié bien haut au-dessus de sa tête. De retour face à nous, elle en écarte bien soigneusement les rabats, s'illumine d'un sourire, comme chaque années, et proclame dans son micro.
Je suis abasourdie. 
Le nom prononcé est celui de Miha Siluarth – et non le mien.

La chute donne envie de lire la suite. C'est qui qui Miha Siluarth d'abord ?